Des témoignages à propos de la mort

Rosette Poletti à l’écoute sur internet. La conférencière et thérapeute vaudoise apporte son expérience et sa sensibilité.
ÉCHANGES - Le site web d’Edipresse hommages. ch ouvre son forum. La conférencière et thérapeute vaudoise Rosette Poletti y apporte son expérience et sa sensibilité.
Parler de son deuil, de sa douleur, des problèmes concrets rencontrés, c’est souvent difficile. On a peur d’ennuyer son interlocuteur, d’être incompris. Voilà les raisons pour lesquelles hommages.ch, le site de Tamedia Publications romandes consacré au décès et au deuil, a créé un espace d’échanges où vous retrouverez Rosette Poletti, présidente de l’association Vivre son deuil.
Quel rôle jouerez-vous sur le forum d’hommages.ch ?
R.P. Ce lieu sera avant tout celui des participants qui s’y rendront pour témoigner, raconter comment ils ont vécu leur deuil, se donner des conseils. Pour ma part, j’interviendrai pour répondre à des questions précises ou spécifiques. Vous m’y lirez aussi si un thème abordé par les internautes me semble nécessiter un développement qui pourrait être utile à un public plus large.
Qu’apporte le monde virtuel à l’occasion d’un deuil?
R.P. Je suis convaincue qu’internet a un rôle à jouer dans le soutien aux personnes en deuil. Evidemment, dans un premier temps, celui du choc, les gens ont d’abord besoin de contacts proches avec leur famille, leurs amis. Mais, dans un deuxième temps, celui du souvenir, les générations qui maîtrisent internet y recourent de plus en plus. Les gens s’y recueillent dans des cimetières virtuels, y cherchent des informations et, bien sûr, un échange avec d’autres personnes endeuillées.
Il y a donc complémentarité?
R.P. Oui, dans l’idéal, c’est comme ça qu’il faudrait que ça fonctionne. Malheureusement, la réalité est différente parce que notre société admet de moins en moins le deuil. A moins qu’il ne s’agisse d’une situation hors norme comme un accident effroyable ou un attentat sanglant. Là, il peut y avoir un intense moment de solidarité, mais il passe très vite. –
La mort «banale» dérange?
R.P. Exactement. Notre société est devenue très dure. Elle veut des gagnants, mais pas de perdants, pas de malades, pas de morts. Je pense que beaucoup de gens en souffrent. Plus aucun signe extérieur, comme jadis le fait de porter des habits de deuil, n’avertit de la fragilité de quelqu’un.
Pourtant, on entend souvent dire que notre société commence à changer d’attitude envers la mort…
R.P. Je n’en suis pas sûre du tout! Si quelqu’un parle de sa douleur, de son chagrin, on va très facilement lui dire: «Tu devrais consulter, va voir un psy.» Ça vient plus spontanément que de prendre le temps de l’inviter à boire un pot et de l’écouter. C’est ça, la réalité.
D’où le besoin d’espaces comme ceux qu’offre internet?
R.P. Oui, grâce à ce genre de nouveaux médias, nombre de gens peuvent créer une autre société où ceux qui sont en deuil s’écoutent et se soutiennent. Ils y trouvent un lieu où leur souffrance est reconnue et où ils n’ont pas à la cacher comme dans la vie quotidienne. Le deuil se porte plus facilement sur internet. –
Est-ce qu’il n’y a pas un risque d’enfermement dans le monde du deuil?
R.P. Non, au contraire. Un forum comme celui-ci va offrir une ouverture aux endeuillés qui le souhaitent. On peut répondre à leurs questions, les aiguiller vers des aides, des soutiens et, surtout, leur permettre de correspondre avec d’autres, de nouer des contacts. C’est tout le contraire d’un repli! – Bientôt les Fêtes.
Comment soutenir des proches en cette période?
R.P. Pour les endeuillés, c’est un moment très difficile, comme celui de la date du décès ou de l’anniversaire de la personne disparue. Son absence se fait particulièrement sentir. Faites savoir à ces personnes que vous pensez à elles, mais soyez compréhensifs si elles refusent vos invitations. Quand on est plein de tristesse à l’intérieur, la joie des autres ne l’atténue pas. Un jour viendra où cela réchauffera, mais ça prend du temps.