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Etre sûre qu'on observe mes désirs

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Il y a quatre ans, Rose Zbinden a signé un contrat avec une entreprise de prévoyance obsèques. Elle explique ses raisons.

Il y a quatre ans, Rose Zbinden a signé un contrat avec une entreprise de prévoyance obsèques. «L’idée m’est venue lors du décès de mon père, confie cette mère de famille de 57 ans. Je me suis dit que ce serait une bonne chose de régler cela pour éviter que mes enfants aient de lourds frais à payer: on ne sait jamais dans quelle situation financière ils seront au moment où je partirai. Je voulais aussi être sûre qu’on observe mes désirs. Je souhaite que mes cendres soient dispersées dans le lac. Quand mes petits­enfants viendront se promener, ils auront une pensée pour leur grand-maman qui est juste là, dans l’eau. J’en ai parlé à mes enfants mais l’un d’eux n’est pas d’accord avec cette idée: il préférerait pouvoir venir me trouver quelque part. Mais je ne veux pas aller dans un cimetière. A quoi bon payer une tombe sur laquelle personne ne va jamais? J’ai peu de connaissances et ma famille n’est pas nombreuse. C’est aussi pour cela que j’ai prévu quelque chose de très court et simple pour la cérémonie. Vous savez, on est bien peu de chose! Je n’ai pas envie de fioritures. Je veux que l’on me mette mes habits courants et j’ai demandé qu’il y ait juste une fleur sur mon cercueil. Si ma famille veut en mettre plus, libre à elle.»

Pour beaucoup, le rituel traditionnel et religieux très cadré ne convient plus. «Auparavant, les rites liés aux obsèques étaient pris en charge de manière collective, analyse Yannis Papadaniel, chercheur à l’Institut d’anthropologie et de sociologie de l’Université de Lausanne. Notre société est devenue beaucoup plus individualiste. Chacun y gagne en liberté par rapport à ses envies et aux contraintes institutionnelles. Cet individualisme rend aussi les gens plus responsables de leur propre vie.» Responsables jusqu’au bout. Jusqu’à ses propres obsèques. «Il y a trente ou quarante ans, le rituel était très respectueux des coutumes, se rappelle Edmond Pittet. Aujourd’hui, les gens osent beaucoup plus exprimer leurs désirs.» Ces vingt dernières années, les choses ont beaucoup changé: la cérémonie religieuse, autrefois omniprésente, n’est aujourd’hui demandée que dans environ 70% des enterrements. Les demandes d’incinération ont passé de 30 à 70%. L’orgue a cédé la place aux CD personnalisés, le vêtement mortuaire, autrefois choisi dans 95% des cas, est remplacé par les habits courants huit fois sur dix.

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